Le jeudi 15 octobre 2020, jour du 550e anniversaire de la signature de l’acte de donation qui marque la première étape de la refondation de Saint- Tropez, la Ville avait organisé une conférence donnée par l’archiviste paléographe Elisabeth Sauze et présenté, lors d’une exposition aux archives communales, les actes fondateurs de la cité.

Michel Perrault, adjoint à la culture, Georges Giraud, 1er adjoint, et Hélène Riboty, archiviste, ont alors imaginé un ouvrage reproduisant et explicitant ces actes fondateurs. Cet ouvrage sera disponible au service culturel et dans les trois boutiques des musées tropéziens vers la mi-février.

Dans quel contexte ce livre, réalisé par les archives communales, sur l’histoire de Saint- Tropez, a-t-il vu le jour ?

Le 15 octobre 2020 a marqué les 550 ans de la refondation de Saint-Tropez, et la municipalité a souhaité célébrer cette renaissance. Les textes historiques, qui ont permis la réalisation de l’exposition aux archives, et la création de cet ouvrage consacré à cet évènement, proviennent directement des actes conservés aux archives communales.

Les documents présentés dans ce livre sont sauvegardés aux archives car Saint-Tropez a eu la chance d’avoir pu préserver l’entièreté du dossier qui décrit la mise au point du processus et les étapes de son développement dans trois actes. Tout d’abord, le premier et le plus solennel, daté du 15 octobre 1470, est l’acte d’inféodation ou de donation. Le seigneur Jean Cossa, baron de Grimaud, cède le fief de Saint-Tropez à un noble génois, Raphaël de Garessio, qui a la charge de repeupler Saint-Tropez afin d’en assurer la reconstruction et la fortification. Le deuxième acte, l’acte d’habitation, que nous célébrons en ce mois de février, daté du 14 février 1471, est le contrat passé entre le nouveau seigneur Raphaël de Garessio et 21 familles qui s’engagent à fixer leur domicile à Saint- Tropez. Le dernier acte, dit acte d’exemption d’impôts, est signé du roi René, comte de Provence, et confirme tous les privilèges qui ont été accordés aux nouveaux habitants.

Mme Elisabeth Sauze, éminente archiviste paléographe, a accepté à partir de ces documents de réaliser une nouvelle transcription et traduction de ces textes dont les originaux sont en latin. Cette traduction nouvelle et intégrale devait être diffusée pour montrer la modernité de ces actes vieux de 550 ans. La municipalité, en publiant cet ouvrage, a souhaité transmettre cette mémoire aux Tropéziens.

Comment ces documents ont-ils « survécu » depuis 550 ans ?

Nous avons archivé jusqu’à aujourd’hui ces actes car ils étaient très importants pour les Tropéziens, principalement pour faire valoir leurs droits d’exemption d’impôts. Il ne faut pas oublier que la Provence est rattachée au royaume de France en 1480. Après la mort du roi René, les Tropéziens vont demander au roi de France de conserver ces exemptions d’impôts fraîchement acquises. Par lettres patentes, tous les rois de France jusqu’à Louis XIV confirmeront ces privilèges. Mais l’autorité royale cherchera toujours à lever des impôts et de nombreux procès opposeront le royaume à la communauté de Saint-Tropez et ses habitants. La production de copies de ces trois actes était nécessaire afin de les présenter devant les différents tribunaux. Ces copies du XVIe et XVIIe siècles ont perduré jusqu’à nos jours grâce à l’opiniâtreté des Tropéziens à faire reconnaître leurs droits pendant près de 200 ans.

Comment ces copies sont-elles conservées et de quand date la plus ancienne ?

Les copies sont à la fois présentes dans les dossiers de procès et également dans un cartulaire élaboré entre les XVIe et XVIIIe siècles. Le cartulaire est un recueil de copies des actes les plus importants de la communauté pour en assurer la conservation.

Le cartulaire de Saint-Tropez regroupe la transcription en latin des trois actes qui a été faite directement à partir des originaux, ces copies sont du XVIe siècle. La copie la plus ancienne que nous possédons est datée de 1542.

Les Tropéziens qui aiment à se raconter leur histoire savent, pour la plupart, que leur ville a été refondée en 1470 par les 21 familles génoises appelées par Raphaël de Garessio. Cela fait partie de notre roman collectif. Mais il est particulièrement émouvant de constater que si les documents originaux relatifs à cette refondation ont été perdus dans les soubresauts de l’Histoire, des copies ont été faites au cours des siècles car les Tropéziens en ont eu besoin pour défendre leurs privilèges devant les tribunaux. Et leurs efforts ont été couronnés de succès, les rois de France successifs ont confirmé ces privilèges.

Ainsi, nos ancêtres ont dû se battre pour obtenir ces lettres patentes de la part des souverains de la France qui, sans cela, auraient bien supprimé les privilèges qui avaient été acquis en 1470 au moment de la refondation contre la promesse de repeupler le lieu et de défendre le golfe. C’est le sens de la phrase « Vu les lettres patentes des rois Charles IX (8 novembre 1564), Henri III (12 septembre 1575), Henri IV (21 Août 1594) et Louis XIII (7 décembre 1610) », qui est prononcée lors de la proclamation de la nomination du capitaine de ville sur le perron de l’hôtel de ville. Le souvenir en est ainsi ravivé annuellement. Cinq-cent cinquante ans après leur signature, les actes fondateurs de notre cité ont donc toujours une certaine actualité, même si l’exemption d’impôts n’a malheureusement plus cours…

Espérons que les Tropéziens garderont toujours le souvenir des libertés qui ont procédé à la refondation de leur cité. Puisse la parution de cet ouvrage y contribuer modestement.

Georges Giraud

1er adjoint